Depuis cette époque, des liens d'amitiés très forts unissent les communes de SIERSTHAL (Moselle) et de VITRAC (Charente). Des rencontres ont lieu régulièrement à SIERSTHAL et à Vitrac. En juin 2005, à l'occasion d'un voyage commémorant le soixantième anniversaire de la libération, la municipalité et les habitants de SIERSTHAL ont inauguré une fresque peinte par M. Klein sur le mur de la salle des fêtes, fresque consacrée à l'exode de 1939.
À Vitrac...
À Siersthal en juin 2005
Et à Vitrac en octobre 2009 - Cliquez ci-dessous -
ESPACE VITRAC - SIERSTHAL 1939-2009
Rappel historique : l'exode de 1939
Dès septembre
1939, lorsque la guerre éclate, le gouvernement français oblige à
l'exode les Alsaciens et les Mosellans qui vivent au milieu de la
zone de combat, entre la ligne Maginot et la ligne Siegfried. A
pied, abandonnant maisons, commerces, bétail et effets personnels,
des milliers de personnes sont ainsi jetées sur les routes et
gagnent, le plus souvent à pied, les gares de la région pour être
évacuées vers le sud et l'ouest. Après l'offensive allemande de mai
1940, une nouvelle vague de réfugiés, encore plus inorganisée, part
vers le sud pour fuir les combats. Une majorité de ces personnes
sont expédiées vers le Poitou-Charentes, le Périgord et le Limousin.
A leur arrivée, rien n'est prévu pour les accueillir. Si certains
bénéficient d'une solidarité et d'un accueil spontanés de la part
des autochtones, d'autres rencontrent une forte hostilité, notamment
les germanophones exclusifs que l'on n'hésite pas à appeler
« boches » ou « ya-ya ». Certains d'entre eux sont sommairement
installés dans des granges en ruines ou des masures insalubres.
D'autres, bien reçus, échangent beaucoup avec leurs hôtes, certains
enfants alsaciens apprenant, par exemple, l'occitan en quelques
semaines et enseignant les bases de leur dialecte germanique à leurs
jeunes amis limousins. Source du document: : http://www.bm-limoges.fr
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PARTIE 1
Les Réfugiés de l'Est Dans notre petit village nous vivions tranquilles et heureux. On peut dire que dans chaque maison, on vivait de notre petite agriculture qui donnait à manger aux personnes et aux bêtes. Les vaches qui nous donnaient lait, crème, beurre ; les cochons qu'on élevait pour avoir de la viande fumée ou salée, les saucisses, le pâté, le saindoux etc. Quelques poules pour avoir des œufs. Nous vivions surtout de nos bonnes pommes de terre, qu'on pouvait manger de beaucoup de façons différentes : rôties, en purée, schnoutzle, floute, knoeple, soupe et galettes. Un champ de blé, un autre de pommes de terre, des betteraves, kolérabi, du chou pour faire la choucroute. Et tout cela occupait toutes les personnes, enfants et grands-parents. Nous ne connaissions rien d'autre et pour tout le monde c'était pareil. Garder les vaches, faire le foin, le blé, tout ce qu'on avait besoin pour vivre. J'étais avec ma grand-mère, elle me racontait parfois de la guerre de 1914-1918. Je lui répondais : "Oui, ça c'était il y a bien longtemps". Je m'imaginais cette guerre comme celles que j'avais apprises à l'école, celles de Napoléon : des soldats avec leurs habits comme le Schwitzer (Suisse) à l'église avec de grandes épées et des longs fusils qui étaient alignés d'un côté et l'ennemi de l'autre, se tirant dessus et se tuant. Des chevaux morts dans les fossés et un canon tiré par les soldats. En ce temps nous n'avions ni radio, ni télévision à peine un journal une fois par semaine avec les événements religieux. On était le 1er septembre 1939, nous étions dans les champs « am Enchenbergerweg » en train de faucher l'avoine, de rassembler les bottes pour faire un tas et au-dessus on mettait un chapeau avec une botte pour bien laisser sécher. A ce moment quelqu'un du village est passé et nous a demandé d'arrêter notre travail, de tout laisser sur place et de rentrer vite à la maison, car nous devions partir au plus vite. Nous sommes rentrés et avons encore entendu le garde-champêtre qui était le « Weber Henri » avec sa cloche annoncer : "Tous les habitants doivent avoir quitté le village ce soir avant huit heures. Défense d'emmener une valise ou autres gros paquets !" En vitesse nous nous sommes lavés, changés de vêtements car nous avions beaucoup transpiré dans les champs. Un baluchon avec du linge de rechange était vite préparé. Il faut aussi dire que des soldats français étaient dans les granges, mais cela arrivait de temps en temps dans le village et nous en avions l'habitude. Ma grand-mère pleurait, elle disait « qu'allons nous faire maintenant et qui va donner à manger à nos bêtes ? ». Moi je disais aux soldats sur place de bien soigner nos bêtes, il faut leur donner à manger et les traire deux fois par jour. Nous pensions que cette guerre n'allait pas éclater et que nous serions de retour dans quelques jours. Vers le soir, une masse de personnes défilaient déjà sur la route. Des gens qui venaient de Holbach, de Hottviller et d'autres villages se suivaient, à pied avec des charrettes ou des landaus, d'autres avaient attelé les vaches à leurs charrettes. C'est ainsi que commençait notre départ pour nulle part. Je pense bien que les maires des communes connaissaient notre destination. Nous devenions comme beaucoup d'autres « les Réfugiés de l'Est». J'avais 16 ans et demi.
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